La grammaire de l'image

  

Longtemps considéré avec mépris comme un divertissement d'ilotes, selon le mot de Georges Duhamel, le cinéma a d'abord tenté de s'affranchir de ce préjugé en exigeant d'être reconnu comme langage.

  

Écoles de cinéma et ciné-clubs ont défini des termes dont la sémiologie de l'image a hérité, mais aussi des règles de montage et de composition qui devaient aboutir à une véritable grammaire de l'image... Aujourd'hui encore certains chercheurs du milieu universitaire, n'ont pas renoncé à l'écrire (voir Marie Carani, ouvrage cité).

  

Il faut reconnaître que de telles règles ne peuvent être tirées que très provisoirement, d'observations limitées dans le temps et l'espace, et que l'artiste remet à chaque instant ses pratiques en cause, sous peine de tomber dans l'académisme le plus stérile et le plus désespérant.

  

En outre personne n'a encore défini de façon convaincante, pour l'image, des unités qui seraient l'équivalent des phonèmes pour la langue. En fait, la logique de l'image est la logique de la perception, qui est une logique de probabilités. Le sens n'est pas donné une fois pour toutes, mais il est affecté avec plus ou moins de certitude : quelque chose apparaît comme étant probablement un nombril, probablement un nez, etc. mais le sens de chaque motif dépend de son environnement, et de l'observateur, le cas limite étant celui de ces devinettes où le chasseur se cache dans le feuillage, ou ce tableau de Magritte, Le Viol, cité dans le même ouvrage par Goïan Sonesson, qui peut être lu tantôt comme un nu féminin entouré d'une chevelure, tantôt comme un visage.

  

Au demeurant, il serait bien étonnant que les méthodes d'une science - la linguistique - puissent s'appliquer à un autre objet que le sien, celui de l'image. Aussi la recherche d'une grammaire de l'image ressemble fort à celle d'une réponse à une question mal posée.