Parler de lecture de l'image n'est pas une simple métaphore, même si lire un texte et lire une image ne sont pas des actes identiques.
La différence entre lire un texte et lire une image se situe au niveau du déchiffrement :
- les yeux ne parcourent pas de la même manière un texte et une image : ils balaient le premier de gauche à droite et de droite à gauche, de haut en bas, par sauts irréguliers, tandis qu'ils parcourent l'image suivant un trajet à peu près triangulaire qui part du haut, descend vers la gauche, va de gauche à droite et remonte vers le point de départ
- la lecture d'un texte consiste à reconnaître des signes, à les associer pour former des mots et des phrases ; la lecture de l'image consiste en la reconnaissance de formes et de couleurs : avant de décider si on a affaire à une figure de la mythologie grecque, ou latine, ou à un ange, on aura reconnu une figure humaine ailée.
Mais au-delà du déchiffrement, le travail d'interprétation présente bien des analogies d'une opération à l'autre : on peut appliquer au texte littéraire ce que dit Régis Debray (Vie et mort de l'image, ouvrage cité) à propos de l'image, qui offre une polysémie inépuisable. Et chaque époque en Occident a eu une façon de lire les images de la Vierge Marie et du Christ, comme elle a eu sa façon de les styliser. Ces lectures nous en disent plus sur l'époque considérée que sur les tableaux. Ce sont autant des symptômes que des analyses. |